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Soutenir les Aidants par le biais des thérapies non médicamenteuses

Longtemps, on ne les a pas vus, pas entendus. Fantômes accablés par leur malade : 8.3 millions de Français - conjoint(e)s, enfants, plus rarement amis ou voisins - prennent soin d’un proche malade ou handicapé, le plus souvent à domicile. Dans 900 000 cas, la personne dont ils s’occupent ainsi est atteinte par la maladie d’Alzheimer. Ils lui consacrent, en moyenne, six heures quotidiennes et à cette énorme charge domestique s’ajoutent la douleur de voir un être aimé décliner, la culpabilité, la méconnaissance de la maladie, l’isolement.
Les aidants s’épuisent et souvent même, en meurent : 30% décèdent ainsi avant leur "aidé", a révélé la fédération France Alzheimer.
A peine 25% d’entre eux s’adressent à une structure de soutien.

En plein scandale des EHPAD, l’appui de ces proches devrait pourtant être considéré comme un ressort essentiel de notre politique de santé. Des forces à préserver.

Depuis 2006, c’est ce que fait l’association A3, à Marseille et à Arles : ses plateformes de répit accueillent près de 2000 aidants. "Au premier rendez-vous, on leur demande simplement comment ils vont et souvent, ils craquent et pleurent : personne ne leur avait jamais posé la question", témoigne Elodie MADOZ, responsable de l’accueil marseillais.

Alzheimer : la bienveillance fait diminuer les troubles

Aidants et soignants se forment à une thérapie non médicamenteuse

L’association leur apporte un soutien psychologique, les informe sur leurs droits, les guident à travers les symptômes d’une maladie pour laquelle il n’existe encore aucun traitement curatif. L’idée ? En faisant du bien aux aidants, on en fait aussi aux "aidés". "Nous sommes dans le prendre soin", aime à répéter Camille Dupré, la directrice.
C’est dans cet esprit - et c’est une "première en France" - qu’A3 leur propose, à partir de ce mois, une formation aux "thérapies non médicamenteuses". Une alternative justement développées par le Dr Thierry Bautrant, président de l’association. Ce géronto-psychiatre les expérimente depuis des années dans l’EHPAD qu’il dirige, à Roquefort-la-Bédoule : "Il ne s’agit pas de traiter la maladie, mais les troubles du comportement associés", précise-t-il."Opposition, déambulation excessive, anxiété, dépression..."
Des manifestations qui s’avèrent aussi "plus terribles" à vivre que la perte de la mémoire. Plutôt que de piocher dans l’armoire à pharmacie, qui "sédate" plus qu’autre chose, le médecin utilise la stimulation cognitive, psychosociale, des modifications légères de l’environnement qui peuvent "faire diminuer les troubles". Une approche "personnalisée", qui se réinvente au contact de chacun et nécessite patience, écoute, "bienveillance".

Utopique, alors que, partout dans les EHPAD, les soignants crient leur mal-être, dénoncent les cadences infernales ? "Ce qu’il faut créer, soutient le Dr Bautrant, c’est une culture d’établissement. Cela ne nécessite pas forcément, pas toujours de moyens en plus".
Ainsi, alors que l’inversion des rythmes veille-sommeil est fréquente chez les patients, son établissement joue sur la variation de la lumière, diffuse de la musique dès 18h, et fait porter aux soignants une tenue différente à la nuit tombée : bref, propose un "rituel" d’endormissement qui a amené "une baisse significative des cris, des déambulations excessives, de l’opposition", décrit le médecin, qui va diffuser "cette technique de synchronisation" dans les 25 EHPAD de la région, grâce au financement de l’ARS PACA.

Se servir de ces thérapies "douces" comme d’une "boîte à outils" en l’adaptant à leur proche, son histoire, ses angoisses, c’est aussi ce que les psychologues d’A3, Chloé Gonzalvez et Emma Mandin vont proposer aux aidants : "pas une baguette magique, non", accordent les jeunes femmes, mais bien des "stratégies" pour aider l’autre. Et s’aider soi.


Delphine TANGUY